Birmanie : en un mois, au moins 6700 Rohingyas ont été tués

Par    ,Mis à jour 

MYANMAR-UNREST-RELIGION-RIGHTS

Alors que 640.000 musulmans rohingyas ont trouvé refuge au Bangladesh pour fuir ce que l’ONU qualifie d’«épuration ethnique», Médecins sans frontières dresse un bilan alarmant sur le degré de violence subie par ces populations apatrides.

Selon les estimations les plus prudentes, au moins 6.700 Rohingyas, dont 730 enfants de moins de cinq ans, ont été tués uniquement lors du premier mois d’une campagne militaire dans l’ouest de la Birmanie entre le 25 août et le 24 septembre, a estimé ce jeudi Médecins sans frontières, qui a mené une étude dans les camps de réfugiés au Bangladesh où 640.000 musulmans rohingyas ont trouvé refuge pour fuir ce que les Nations unies qualifient d’«épuration ethnique».

Pour cette période d’un mois, dans l’Etat d’Arakan en Birmanie où se déroulent les violences, l’ONG a enregistré des taux de mortalité pour les Rohingyas près de dix fois supérieurs à ceux de la période allant du 27 mai au 24 août. En cause, les violences qui sont à l’origine de 71% des plus de 9000 décès enregistrés dans cette partie de la Birmanie qui jouxte le Bangladesh.

Mais «le nombre de décès est vraisemblablement sous-estimé», a précisé le Dr. Wong de MSF, qui a interrogé plus de 11.000 réfugiés au Bangladesh. L’étude de MSF n’a en effet porté que sur 80% des réfugiés nouvellement arrivés. «Si nous appliquons [ces taux de mortalité] à l’ensemble de la population [déplacée récemment], environ 11.393 personnes sont mortes, dont 1.713 enfants de moins de cinq ans. Parmi ces décès, 8170 l’ont été à la suite de violences, dont 1247 enfants», précise l’ONG qui estime que les chiffres sont probablement plus élevés encore dans la mesure où l’étude ne prend pas en compte les personnes qui n’ont pas pu fuir la Birmanie, ou les familles dont tous les membres ont été tués.

Des familles entières mortes à l’intérieur de leurs maisons incendiées

L’exode se poursuit encore aujourd’hui et les personnes qui fuient «disent avoir subi des violences ces dernières semaines», rappelle MSF. Un bilan très loin des chiffres fournis par l’armée birmane qui a jusqu’ici évoqué environ 400 morts du côté des «terroristes» rohingyas.

Pour l’ONG, «l’ampleur et la nature des violences mises au jour sont effroyables». «Nous avons entendu des personnes raconter que des familles entières avaient péri après que les forces armées les ont enfermées dans leurs maisons avant d’y mettre le feu», raconte le Dr. Wong. Sur l’ensemble des 6.700 morts par violence, les enquêtes montrent que 69% ont été tués par balles, 9% à la suite de brûlures mortelles, 5% de tabassages, 2.6% après des violences sexuelles.

» LIRE AUSSI – Birmanie: la répression s’intensifie contre les Rohingyas

La campagne de répression de l’armée birmane entamée le 25 août faisait suite à des attaques de postes de police par les rebelles de l’Armée du salut des Rohingyas de l’Arakan (ARSA). Les généraux birmans restent très puissants malgré la dissolution en 2011 de la dictature militaire qui a joué sur la peur de l’islamisation de la Birmanie pendant ses décennies au pouvoir. Critiquée pour sa passivité, la dirigeante Aung San Suu Kyi est restée très en retrait depuis le début de la crise alors que les violences et discriminations contre cette minorité musulmane se sont intensifiées ces dernières années.

Les Rohingyas représentent la plus grande population apatride du monde depuis que la nationalité birmane leur a été retirée en 1982, sous le régime militaire. Victimes de discriminations, ils n’ont pas de papiers d’identité, ne peuvent pas voyager ou se marier sans autorisation. Et ils n’ont accès ni au marché du travail ni aux services publics comme les écoles et hôpitaux.


Commentaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *